lundi 28 janvier 2013

Haïti/Québec : Histoire de Famille, les Anglade !

 Le 12 janvier 2010, un très violent tremblement de terre tue 230 000 personnes en Haïti. Sous une lourde dalle de béton, on retrouve un couple qui se tient la main. Une triste fin pour Mireille Neptune et Georges Anglade, longtemps exilés au Québec mais attachés jusqu’à la fin à leur terre natale.

Les Anglade ne sont qu’une centaine au Québec. Ils font cependant partie de l’une des plus importantes communautés immigrantes. Entre 1974 et 1989, les Haïtiens forment la plus importante cohorte de nouveaux arrivants. La grande majorité s’établit à Montréal où sont créées des institutions d’entraide. La première vague d’immigration haïtienne arrive au tournant des années 1970. Elle est surtout formée d’écrivains et d’intellectuels comme Georges Anglade.

PIONNIER DE L’UQAM
 
Né en 1944 à Port-au-Prince, celui-ci appartient à la 6e génération d’Haïtiens nés après l’indépendance proclamée en 1804. Colonie française habitée par des esclaves, la république d’Haïti paie chèrement sa liberté. En 1825, la France reconnaîtra son indépendance à la condition qu’elle rembourse une lourde indemnité. Haïti finit de rembourser sa « dette » un siècle plus tard… La république n’est pas au bout de ses peines. De 1915 à 1934, les Américains occupent le pays. Aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale, les Haïtiens reprennent le contrôle… du moins jusqu’à ce que François Duvalier soit proclamé président à vie, en 1964. Une dictature prend place…
L’année suivante, Georges Anglade et sa femme vont en France faire leur doctorat en géographie et en économie. Une fois son diplôme en proche, le géographe entend parler de l’Université du Québec à Montréal, sur le point d’ouvrir ses portes. Nous sommes en 1969. Tout est à faire !

Il sera l’un des fondateurs du département de géographie de l’UQAM. Avec les Québécois, il retrouve « avec plaisir, le style américain aux manières directes, affables et conviviales », explique-t-il dans un livre d’entretiens. Après un séjour tumultueux en Haïti en 1974, durant lequel il est emprisonné, il publie des manuels de géographie vendus à des centaines de milliers d’exemplaires dans son pays.

UN INTELLECTUEL ENGAGÉ

L’enseignement et la recherche le comblent, mais la volonté de servir son pays le tenaille. Le 7 février 1986, le dictateur Jean-Claude Duvalier fuit le pays. Georges Anglade croit que c’est aux leaders de la 6e génération d’entrer en scène. Avec d’autres réformateurs, il fonde le Mouvement haïtien de solidarité. Son grand projet : mobiliser les meilleurs talents de la diaspora haïtienne dispersée aux quatre coins du monde.
Le 15 novembre 1990, il publie le manifeste « La chance qui passe » du parti de Jean-Bertrand Aristide qui devient président un mois plus tard. Son élection suscite énormément d’espoir. Hélas, moins d’un an plus tard, un coup d’État oblige Aristide à s’exiler. De 1992 à 1994, Anglade défend la cause haïtienne à Washington.

Après le retour de la démocratie, il accepte un poste de ministre des Travaux publics. Durant ses 300 jours aux commandes, il est victime de deux attentats. Il demande à son cousin Édouard, un policier de Montréal, de former des agents haïtiens. Malgré sa bonne volonté, il n’arrive pas à imposer ses réformes.
Cette passion du service public, il l’a transmise à sa fille Dominique, née au Québec en 1974, aujourd’hui présidente de la Coalition pour l’avenir du Québec (CAQ).

Georges Anglade a aussi laissé une œuvre littéraire. En 1999, il remportait le prix José Marti de l’UNESCO.

Eric Bedard


Credits : EricBedard/LeJournaldeMontréal/CANAL+HAITI



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Written on:juin 4, 2012

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